A l’issue de ces Régionales, la France est dans un très mauvais état. La mobilisation de millions de concitoyen-ne-s ayant choisi un bulletin de vote opposé à leurs convictions a permis d’éviter le pire, que le FN remporte des régions. Cela ne saurait cacher la progression en voix du FN dont les thèmes auront marqué toute cette campagne, avec parfois même le concours du gouvernement, dans un climat de mensonges, de peur, de surenchère sécuritaire et xénophobe.
Ailleurs les triangulaires ont permis, le plus souvent avec un écart réduit, la victoire tantôt aux listes LR, tantôt aux listes conduites par le PS. Ces dernières ont évité la déroute en bénéficiant de la mobilisation d’un électorat qui, malgré tout, s’est servi de ce bulletin pour empêcher une droite, aiguillonnée par le FN, d’aggraver encore plus la situation. Cela n’a pas été suffisant en Ile-de-France où le rejet de la politique gouvernementale a lesté la liste de Bartolone, quand la liste de Pécresse a profité d’un bon report d’une partie de l’électorat du FN, notamment des supporters de la Manif pour Tous. Le PS aurait tort de se satisfaire d’avoir conservé 5 régions sur les 12 de France métropolitaine. Ce résultat n’est en aucun cas un vote d’adhésion pour la politique menée par le gouvernement.
Le bilan de Manuel Valls est terrible. Il a décidé d’anéantir toute représentation de gauche dans deux régions, sans utilité autre que ses calculs politiciens pour 2017 comme le démontre le résultat maintenu de Jean-Pierre Masseret en ACAL qui n’ a pas empêché la défaite de Philippot. Le bilan social du gouvernement est celui d’un pays défiguré par un chômage et une pauvreté record, quand les dividendes des actionnaires ne cessent de croître. Un Etat affaibli par la baisse des dépenses publiques, une activité économique en berne, un accord COP21 en trompe l’oeil et qui n’est absolument pas à la hauteur de l’urgence climatique. Le bilan moral est aussi sans appel : en reprenant la mesure du FN de déchéance de la nationalité, il a de fait validé la bataille culturelle menée par l’extrême droite xénophobe. Avec la poursuite de cette politique le pire est devant nous.
Si François Hollande agissait en homme d’Etat, il prendrait acte de la situation et renverrait Manuel Valls afin de de rompre radicalement avec la politique austéritaire de l’offre qui conduit le pays vers l’abime. Il proposerait la seule loi d’urgence qui vaille, celle d’un collectif budgétaire donnant la priorité au pacte social et écologique sur le pacte de stabilité.
Si le PS agissait en parti de gauche, le sursaut invoqué hier par Jean-Christophe Cambadélis serait celui de se tourner vers un Front Populaire pour mettre en mouvement le peuple à l’opposé du social-libéralisme qui a gangréné son parti depuis des années. La situation est en effet aussi grave que celle des années 30.
Mais nous n’avons pas d’illusions. Il faut donc plus que jamais travailler à une autre voie. Dès les législatives de 2012, l’autre gauche n’aura jamais su faire fructifier ni même simplement rassembler l’élan populaire qui s’était porté derrière la candidature présidentielle de Jean-Luc Mélenchon. Chaque élection intermédiaire a brouillé plus encore nos messages, par un refus de nationaliser les enjeux, quand le FN lui n’a cessé de se construire dans une stratégie de conquête du pouvoir.
L’abstention qui reste massive révèle bien cette insurrection froide qui n’a pas trouvé encore sa voie. Le FN continue sa progression, mais il n’a pas gagné. La colère du peuple doit trouver une expression positive, notre responsabilité est immense pour y contribuer.
Il est désormais impératif d’être audacieux et de défricher d’autres formules politiques que celles qui ont échoué pour mettre en mouvement.