Le taux de chômage atteint aujourd’hui des sommets : avec 9,7% de la population active, 10,2% DOM compris. La France compte aujourd’hui près de 6 millions de travailleurs inscrits en recherche d’emploi. Le chômage endémique depuis les années 1970… est bien confortable pour le système : la peur du chômage est une muselière efficace pour empêcher les travailleurs de revendiquer de nouveaux droits et des hausses de salaire et permettre au gouvernement allié du Medef de casser le droit du travail !
Il est temps d’en finir avec les potions libérales qui nous sont imposées depuis 30 ans, aussi inefficaces contre le chômage que favorables aux profits des grands groupes privés. Ce n’est pas la guerre aux chômeurs qu’il faut mener comme le bien mal nommé ministre du travail Rebsamen, c’est relancer l’activité et affronter le coût du capital. En finir avec le chômage, nous on peut !
1) En finir avec les seules exonérations de cotisation
Les politiques de l’emploi depuis 30 ans s’inspirent toujours du même schéma libéral : abaisser le « coût du travail » et augmenter la com-pé-ti-ti-vi-té. Et toujours le seul levier : les exonérations de cotisations sociales. Pourtant aucun consensus universitaire rigoureux n’a pu en démontrer l’efficacité ! La Cour des comptes et un récent rapport du Sénat en soulignent même le coût exorbitant, de l’ordre de 1,5 % du PIB et dépassant les 300 milliards de coût cumulé… pour un impact limité voire nul sur l’emploi. Pire, ces baisses de cotisation étant ciblées sur le SMIC et les plus bas salaires, elles entraînent les salaires vers le bas et sont mal ciblées, favorisant trop souvent des secteurs qui ne sont pas en difficulté ni soumis au dumping mondial. Il faut donc de revenir sur tout ce processus aveugle d’exonérations enclenché par Édouard Balladur en 1993 et suivi par les gouvernements Juppé, Fillon et Valls.
2) Le secteur public, un levier pour relancer l’emploi
Pour créer massivement des emplois, le secteur public s’avère décisif et efficace. Il est même économique quand on le compare au coût des dispositifs Hollande de type CICE ou pacte d’irresponsabilité). Le plus urgent est de revenir sur les 190 000 suppressions d’emplois opérées depuis 2007 (150 000 sous la droite et 40 000 déjà sous Hollande) et la titularisation des précaires de la fonction publique. Sur 5 ans, il est ensuite possible de créer plusieurs centaines de milliers d’emplois publics, en assumant un recrutement progressif et une formation de qualité. Des besoins énormes existent (écoles, universités, crèches, justice, police, douanes, etc.). Les fonctionnaires créés pourraient même rapporter à l’État dans certaines missions cruciales tels que les services fiscaux pour lutter contre la fraude et l’évasion fiscales ou l’inspection du travail.
3) Relancer l’activité par la demande, une clé pour la création d’emploi
Les politiques libérales cherchent à opposer les travailleurs entre eux, comme si les droits acquis ou gagnés par les salariés se faisaient aux dépens des créations d’emploi. Or c’est tout le contraire ! La relance de l’économie par la demande accorde davantage de droits pour les travailleurs, de meilleurs salaires et conditions de travail… pour créer des emplois en créant un cercle vertueux.
Cette relance de l’activité par la demande passera d’abord par une hausse des salaires et des minima sociaux, la mise en place d’un salaire maximum et la limitation des écarts de salaires de 1 à 20 dans les entreprises. Elle passe aussi par la fin du gel des salaires des fonctionnaires et le rattrapage sur l’inflation depuis 2000 via une refonte de la grille des échelons des fonctionnaires. À titre d’exemple, le SMIC à 1700 euros permettra une hausse de salaire de 20 milliards d’euros pour les les plus modestes ; la revalorisation du point d’indice des fonctionnaires représenterait une augmentation de la consommation à hauteur de 10 milliards d’euros. Ce sont de l’ordre de 240 000 emplois supplémentaires qui pourraient être ainsi créés en quelques mois ! La relance de l’économie par la demande revient aussi à mettre fin à la précarité et faire du CDI à temps plein la norme : c’est à cette condition que les salaires permettront de relancer la consommation.
Améliorer les conditions de travail des salariés, c’est aussi partager le temps de travail et par conséquent créer des emplois. C’est la raison pour laquelle nous proposons d’appliquer réellement les 35 heures pour tous et aller vers les 32 heures sur le modèle de la semaine de 4 jours… tout en revendiquant une 6ème semaine de congé payés et la retraite à 60 ans. Il y a là encore un gisement de plusieurs centaines de milliers d’emplois.
4) Relancer l’activité par l’investissement public et rompre avec le libre-échange
La relance de l’activité passe également par un investissement public massif et ciblé sur les besoins pour créer des emplois utiles et non délocalisables.
Investir, c’est créer des emplois !
Construire 200 000 logements chaque année, majoritairement destinés à l’habitat social, reviendrait à créer plus de 100 000 emplois. Mêmes résultats avec l’ouverture de 100 000 nouvelles places en crèche et le développement des transports collectifs. La transition énergétique, en s’appuyant sur les investissements dans le secteur des énergies renouvelables, la remise aux normes énergétiques des bâtiments, le développement de la géothermie, permettrait de créer plus de 700 000 emplois selon le scénario Négawatt. Le développement d’un nouveau modèle agricole permettrait, selon la confédération paysanne, la création de 300 000 emplois supplémentaires. Enfin le soutien au développement de l’économie sociale et solidaire permettra de combler les 150 000 postes vacants dans ce secteur. D’autres pistes restent encore à explorer, notamment l’économie de la mer.
Assumer le protectionnisme
Selon l’Insee, entre 2000 et 2005 les délocalisations ont entrainé la destruction de 36 000 emplois chaque année en France. Depuis la crise de 2008, ce sont 60 000 emplois qui sont supprimés tous les ans en raison des délocalisations. La reconstitution d’une capacité de production nationale est impossible sans de fortes mesures de protection commerciale. Le protectionnisme est donc un puissant levier pour réorienter la production et la consommation vers les besoins humains, compagnon logique de la planification écologique permettant d’instaurer des protections sociales et environnementales. C’est dans ce cadre que doit s’inscrire notre politique de création d’emplois !
Sylvie Aebischer et Boris Bilia