Le 29 novembre 1943, alors que le territoire de la Yougoslavie est encore occupé par les armées nazies, le Conseil Antifasciste de Libération Nationale (AVNOJ) dirigé par Tito crée, à Jajce (Bosnie centrale), la Fédération Démocratique de Yougoslavie.
Le pays paie un lourd tribut à la 2ème Guerre mondiale : plus d’un million de morts, civils et militaires, soit les pertes cumulées de la France et du Royaume-Uni. La violence et l’ampleur des combats livrés par les partisans – jusqu’à 300 000 combattants – expliquent cette mortalité. Les Yougoslaves, aux cris de « Plutôt la tombe que l’esclavage », lancent une résistance spontanée qui retiendra plus de cinq semaines les armées nazies. Un délai crucial, en cette veille de l’hiver 1941, qui retardera d’autant le déclenchement du plan Barbarossa. Tout au long de la guerre, plus de 32 divisions du Reich restent bloquées en permanence en Yougoslavie.
A l’issue de la guerre, la Yougoslavie, seul pays d’Europe libéré sans le concours des alliés, joue un rôle international d’une grande ampleur. Refusant de signer le pacte de Varsovie, tout en s’opposant à l’impérialisme occidental, la Yougoslavie est un des leaders du « mouvement des non alignés », une forme d’altermondialisme avant l’heure.
La Yougoslavie développe et met en place l’autogestion, principe selon lequel les entreprises doivent être gérées par ceux qui y travaillent et non par des instances centralisées de l’Etat, encore moins des capitalistes. Ce système, fondé sur la répartition de la richesse, naît au sein de la résistance, au milieu des larmes et du sang, tout comme le programme du Conseil national de la résistance en France, qui propose des orientations politiques similaires.
Pourtant nulle commémoration ne viendra rappeler ces faits, ni dans les pays d’ex-Yougoslavie, gagnés par le nationalisme et refusant de célébrer un passé commun, ni ailleurs. Démembrée par les impérialismes allemand et étasunien, la Yougoslavie a disparu. La Gross Coalition CDU-SPD aura ainsi réussi, politiquement et économiquement, là où le 3ème avait échoué militairement, détruisant non seulement le pays, mais jusqu’à la mémoire de l’idéal dont il était porteur.
Djordje Kuzmanovic