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Mise en place

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Peu à peu le paysage des prochaines européennes se dessine. Pour l’heure il ne s’agit que des grandes lignes. Mais elles constituent le cadre essentiel. Samedi a renforcé l’émergence de deux blocs. Le Parti de la Gauche européenne (PGE) a décidé de défendre un candidat à la présidence de la Commission pendant que les militants du SPD votaient à 75% pour la « grande coalition » avec Merkel.

Leur confrontation a déjà des visages. D’un côté Alexis Tsipras, de l’autre Martin Schulz, candidat du Parti Socialiste Européen (PSE). « Encore vous vous en prenez à la social-démocratie au lieu de combattre la droite !» entonnent déjà les solfériniens et leurs perroquets médiatiques. Mais nous ne connaissons pas le candidat de la droite européenne. Ce fait n’est pas innocent. Le PPE discute de l’opportunité d’en présenter un. Et Angela Merkel fait circuler discrètement une hypothèse : pourquoi pas Martin Schulz lui-même ?

Eh oui, ceux qui pensent que la grande coalition restera cantonnée à l’Allemagne sont des naïfs ou des menteurs. L’Union européenne repose sur des traités mais aussi sur la cogestion entre la droite et les sociaux-démocrates. Ils travaillent côte à côte dans la Commission européenne, se répartissent la présidence tournante du Parlement… et constitueront bientôt des gouvernements communs dans 13 pays de l’Union. La moitié ! Même en France, on entend le PS se réjouir du contenu de l’accord de coalition signé entre la CDU et le SPD, validant la thèse selon lequel on peut construire l’Europe sociale main dans la main avec la droite, qui plus est dans un gouvernement qu’elle dirige.

Le parti qui dirige l’Union européenne n’a pas de nom. On pourrait l’appeler PPSE, comme les espagnols qui baptisèrent PPSOE la convergence néolibérale du PP (droite) et du PSOE (sociaux-démocrates). Il dispose désormais d’un commandement unifié : le gouvernement allemand. Il est doté d’un programme commun. Il ne lui reste qu’une étape à franchir, difficile mais pas hors d’atteinte. Ce serait un candidat commun, un allemand nécessairement : aux yeux de Merkel, Martin Schulz, un temps pressenti pour être son ministre des affaires étrangères, est un candidat idéal.

Face à lui, le choix d’Alexis Tsipras est lourd de sens. C’est la première fois que nous partirons à l’élection avec un candidat à ce poste. Face au naufrage de la social-démocratie, l’autre gauche est prête à exercer le pouvoir. Tsipras représente aussi l’indépendance absolue par rapport à la social-démocratie. Son parti a même dû affronter en 2010 une scission avec une aile prête à s’allier avec le PASOK. Sa désignation est cohérente avec notre stratégie de désobéissance pour faire craquer la chaîne austéritaire. Car il aide nos camarades grecs qui sont à deux pas du pouvoir. S’ils l’emportaient cela ouvrirait une brèche pour tous nos peuples.

Ceci n’est pas le sens politique que donnerait le seul Parti de Gauche à la désignation de Tsipras. Le document politique du PGE se réfère à la désobéissance européenne, tout comme au combat pour offrir une alternative de gauche à une social-démocratie faillie. Les camarades ont bien travaillé. Notre motion écosocialiste a même été adoptée à la surprise de beaucoup ! Bien sûr les relais solfériniens ne retiendront que notre décision de suspendre notre participation au PGE pour ne pas associer notre campagne européenne au choix qu’a fait son président réélu Pierre Laurent de l’alliance avec le PS d’Hollande et Schulz, notamment à Paris. Une alliance qu’il justifia dans son discours de clôture, bruyante fausse note dans la cohérence politique de notre dispositif européen.

François Delapierre, Secrétaire national du Parti de Gauche