Loin d’être un signe d’ouverture du Vatican qui se dote pour la première fois d’un Pape non européen, l’élection à sa tête de l’argentin Jorge Mario Berloglio sonne la volonté de l’Eglise catholique romaine de reprise en mains de tout le continent latino-américain qui a vu se développer les régimes progressistes fondés sur les révolutions citoyennes et mettant en œuvre d’importantes réformes de société.
Jorge Mario Berloglio a été auditionné plusieurs fois concernant les crimes commis par la dictature militaire entre 1976 et 1983, sous laquelle l’Eglise argentine avait gardé un silence complice, et en particulier sur les vols d’enfants et le mouvement des Mères de la place de Mai. Il s’oppose ouvertement à l’avortement et à l’euthanasie, en qualifiant le mouvement pro-choix de «culture de mort». Il s’est aussi publiquement opposé à la distribution gratuite de préservatifs. Pourtant, 500.000 femmes ont aujourd’hui recours à des avortements illégaux en Argentine et chaque année une centaine en meurt.
Alors que l’Argentine de Cristina Kirchner fait figure de modèle à l’échelle du monde en matière d’égalité des droits pour les homosexuels (loi sur le mariage égalitaire en 2010) et les personnes transgenres (loi sur la liberté du genre en 2012), qu’accompagnent sur le continent des démarches de reconnaissance des couples homosexuels au Mexique, Brésil, en Equateur, Colombie et dernièrement au Parlement d’Uruguay, et de reconnaissance des droits des personnes transgenres à Cuba, l’ex-primat d’Argentine, s’est prononcé contre ces avancées de société. Il a ainsi qualifié le mariage entre personnes de même sexe « d’origine démoniaque » et de « prétention destructrice contre le plan de Dieu », et l’adoption homoparentale de « machination visant à tromper les enfants de Dieu ».
Le message de cette élection est clair : avec un Pape « 100% réac », la libération, l’émancipation et l’égalité des droits ne seront toujours pas à l’ordre du jour du Vatican. L’Eglise catholique dit « longue vie »… au patriarcat !
Delphine Beauvois et Jean-Charles Lallemand,
Secrétaire nationale à l’égalité Femmes-Hommes et Secrétaire national à l’égalité des droits