Le deuxième tour des Départementales a amplifié la victoire de la droite. Le FN a poursuivi son enracinement dans le pays même s’il ne parvient, heureusement pas, à le concrétiser en élus à la hauteur de ses ambitions. Le Parti socialiste a subi, en retour, une raclée historique. La politique du gouvernement en est la cause. En ayant recyclé une part du programme xénophobe de l’extrême-droite, l’UMP a également une grande part de responsabilité dans la montée du FN qui capte ainsi une part non négligeable d’un électorat populaire de droite radicalisé. Dimanche a donc été un jour maussade pour le pays et la République sur fond d’une abstention de la moitié de l’électorat qui reste l’élément premier de la période. Nous sommes bien dans une période de ressac.
Dans ce contexte globalement mauvais, il y a pourtant également des raisons d’espérer pour la suite. Le premier tour des élections départementales avait en effet montré que les candidats que nous soutenions n’avaient pas subi le même recul que le PS et ses alliés. Il s’agissait même de notre premier rebond depuis les Présidentielles, insuffisant certes pour prétendre constituer immédiatement une alternative mais posant au moins des jalons positifs pour l’avenir.
Ce 2ème tour confirme cette tendance. C’est avant tout le PS qui subit une défaite historique méritée. Et plus encore l’exécutif. La perte des départements du Président de la République (Corrèze) et d’un Premier ministre (Essonne) très engagé dans la campagne, en est le symbole. Ce n’est pas le cas des listes comportant au moins un candidat du FDG. Nos résultats concrétisent ainsi nos 9,4% du 1er tour (11 ,9 % sur les cantons où nous étions présents).
Avant cette élection, le FDG comptait 234 élus. Il en a aujourd’hui 176, soit seulement 25 % de baisse, loin de ce qui avait été craint un moment. Loin de la baisse enregistrée par le PS qui en perd la moitié. Encore ne compte-t-on pas dans ce résultat les conseillers EELV élus dans le cadre de rassemblements avec nous. Le FDG a en outre préservé un de ses deux départements : le Val de Marne dirigé par le communiste Christian Favier. Soit celui des deux où il avait opté, partout, pour une stratégie d’autonomie au 1er tour.
Tout démontre que la stratégie d’autonomie a payé
En effet, on enregistre des victoires dans les ¾ des circonscriptions où des candidats du FDG étaient engagés. Là aussi c’est nettement mieux que le PS qui en perd la moitié.
Par ailleurs en Ile de France, les deux départements qui ont échappé à la droite ont vu le FDG en autonomie partout au 1er tour : le Val de Marne brillamment remporté par le FDG, et la Seine-St-Denis. A l’inverse, l’Essonne où le FDG n’a pas pu s’entendre sur cette stratégie (le PCF a choisi l’alliance avec le PS et EELV au 1er tour) est largement remporté par la droite. Voilà une réponse concrète aux dirigeants socialistes qui nous intiment l’ordre de nous ranger derrière leur bannière au 1er tour des élections pour des questions d’efficacité.
Le meilleur rempart à gauche contre le FN
Là où le FDG était en autonomie dès le 1er tour, nous gagnons 32 duels contre le FN pour 1 seul de perdu ! Aucun autre parti de gauche ne peut présenter un tel ratio (et encore ne compte-t-on pas ici le sans-faute réalisé dans 10 triangulaires, dont la plupart contre la droite et le FN). L’écart est souvent sans appel à l’image des près de 60 % réalisés par Claude Chaidron, sortant PCF, et Dolorès Esteban, soutenus par les seuls PG et Ensemble au 1er tour à Amiens 1.
Beaucoup de ces duels ont eu lieu dans des départements ou tout au moins des circonscriptions populaires. Des circonscriptions où le FN a accédé au 2ème tour en ayant, on l’a dit, manifestement gagné une partie de l’électorat populaire de la droite classique radicalisé. Confirmation de la fumisterie des théories qui prétendent, sans preuve, que la progression du FN est assurée par un transfert d’anciens électeurs de la gauche radicale et notamment communiste. Au contraire, nos candidats constituent ici le barrage le plus efficace contre le FN.
A noter enfin que nos candidat-e-s, qu’ils soient en rassemblement avec EELV comme à Grenoble (dans deux cas sur quatre) où seulement FDG, gagnent sept duels sur 13 face au PS. Et parfois très largement, comme à St Vallier en Saône-et-Loire (PCF-FDG). C’est là aussi un fait nouveau pour « notre gauche » : comme lors des Municipales à Grenoble, dès lors que nos listes sont en capacité de l’emporter au 2ème tour face au PS, elles voient arriver un grand nombre d’électeurs qui concrétisent voire amplifient la victoire.
C’est d’ailleurs ce qui s’est passé dimanche aussi lors de la Municipalepartielle de Vénissieux où Michèle Picard, à la tête d’une liste de même type de rassemblement, (FDG/EELV/ND) l’a emporté avec 42,85 % des voix contre 32 % à la droite, 12,85 % au FN et 12,20 au PS !
En dehors de la déculottée du PS et des forces gouvernementales, il se sera donc passé quelque chose à gauche lors de ces élections. Dans sa déclaration pour les Départementales adoptée en décembre, le FDG avait proposé une stratégie nationale d’autonomie au 1er tour. Celle-ci s’est quasiment partout appliquée. C’est la première raison de ce rebond. Il avait ensuite souhaité l’élargissement du rassemblement. Là encore le grand nombre de circonscriptions qui nous ont vu rassemblés avec EELV, Nouvelle Donne etc. a démontré son potentiel, même si nous regrettons que tout le FDG ne se soit pas toujours ainsi rassemblé.
Mais tout cela restera vain si nous ne sommes pas capables d’aller plus loin. Il faut désormais s’atteler à deux chantiers contenus dans cette déclaration qui, eux, n’ont pas été menés à bien. Le premier est celui d’une démarche citoyenne : le rassemblement citoyen que nous proposons à nos partenaires doit reposer sur de véritables assemblées citoyennes. C’est la condition de notre réussite. La seule méthode pour ramener à la politique une partie au moins de ceux qui aujourd’hui ne voient plus la nécessiter de voter. Là où elle a vu le jour, d’une manière ou d’une autre (voulue et donc impulsée par des partis ou partant d’appels citoyens) cela a été une réussite. Le second est la visibilité nationale de ce rassemblement que nous voulions dès les Départementales, sous forme d’un label, et que nous n’avons pu mettre en place. Dans une élection nationale nous en avons évidemment pâti. Nous ne pourrons nous payer le même luxe aux Régionales. Voilà ce que nous voulons proposer dans les jours à venir à ceux qui ont été nos partenaires dans cette élection départementale. Voilà ce qui doit monter, sans attendre, d’appels et d’initiatives citoyennes dans tout le pays.
Face à cette déroute, Manuel Valls a affirmé qu’il poursuivrait la même politique. Il annonce donc de nouvelles défaites pour son camp mais surtout promet ainsi d’entraîner le pays dans sa chute annoncée. Nous refusons pareil avenir. Nous refusons le tripartisme fictif que l’on veut nous imposer pour 2017 au nom d’un seul programme : empêcher le FN de prendre le pouvoir. Avec 11% des voix pour les candidats de la gauche d’opposition au 1er tour celui-ci est une fiction ; avec plus de la moitié du peuple qui s’abstient, c’est un déni démocratique à l’image de la 5e République. Voilà pourquoi nous ne nous rendrons pas à l’invitation du PS qui propose en réalité aux forces de gauche de se rallier à la politique de son gouvernement. Ce serait suicidaire et la meilleure manière d’ouvrir définitivement la voie à l’extrême-droite.
D’autant que l’on sait que cette politique va s’aggraver. Alors que la saison 1 n’est même pas achevée, le Liberal Killer Emmanuel Macron propose déjà une saison 2 pour l’été, répondant ainsi aux ordres de Bruxelles et Berlin.
C’est pourquoi, dans l’immédiat, l’urgence est d’organiser la résistance contre la politique d’austérité. Elle commence le 9 avril par la grande journée de grève interprofessionnelle, qui sera précédée le 7 par un grand meeting unitaire à Paris, Salle Japy. Tout indique que la manifestation nationale sera la plus grande de ce type depuis l’arrivée de François Hollande au pouvoir. Nous appelons toutes et tous à manifester derrière nos syndicats pour en faire le plus grand succès possible. Et montrer, à sa manière, que le tripartisme est une escroquerie.
Eric Coquerel SN à la coordination politique du PG