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L’Europe austéritaire nuit à la santé

La santé, grande absente des élections européennes
La santé des citoyens européens est aujourd’hui en péril sous l’effet des politiques d’austérité ordonnés par la tristement célèbre Troïka (Commission Européenne, Banque Centrale Européenne, Fonds Monétaire International), dont les agissements s’apparentent désormais à ceux d’une organisation criminelle. A force d’êtres aveuglés par le « poids » des dépenses de santé dans le PIB, les néo-libéraux à la tête de ces institutions ont oublié l’essentiel : derrière les chiffres et les indicateurs, il y a des êtres humains qui souffrent et pour qui la moindre augmentation du prix des soins a des conséquences dramatiques.

L’austérité tue

La Grèce, véritable laboratoire de la politique austéritaire, constitue l’exemple le plus tragique de l’effet sur la santé de l’austérité. Pour obtenir un nouveau prêt de la part de la Troïka, la Grèce a en effet dû s’engager à plafonner sa dépense publique de santé à 6% du PIB. Pour ce faire, le gouvernement grec n’a pas hésité à tailler dans tous les secteurs : le budget des hôpitaux publics a été réduit de 50% entre 2010 et 2014, avec à la clé des restructurations et des fermetures d’hôpitaux, une baisse de 10% du salaire du personnel médical et paramédical, la suppression de 2000 lits à l’hôpital , une pénurie de médicaments, de dispositifs médicaux et de personnel, ainsi qu’une coupe drastique dans les remboursements des médicaments et les programmes publics de prévention. Dans le même temps, pour compenser le désengagement de l’Etat, ce sont bien évidemment les usagers qui en font les frais avec des franchises en augmentation (5€ par consultation, 1€ par boite de médicament) qui limitent l’accès aux soins, notamment des plus démunis, dont le nombre ne cesse d’augmenter sous l’effet de ces mêmes politiques austéritaires. Au total, les dépenses de santé ont diminué de plus de 20% entre 2009 et 2011.

Les conséquences sanitaires de cette politique sont catastrophiques, et pour le dire clairement, honteuses : les infections au VIH chez les toxicomanes ont été multipliées par 30 entre 2010 et 2013, l’incidence de la tuberculose a plus que doublé entre 2012 et 2013 ; entre 2008 et 2011, le nombre d’enfants mort-nés a grimpé de 21 %, la mortalité infantile de 43%, les dépressions majeures ont été multipliées par 2,5 et les suicides ont bondi de 45%. L’austérité a ainsi tué ou rendu malades des milliers de grecs, faute de médicaments, de personnel médical, de programmes de prévention, d’accès aux soins les plus élémentaires, au moment même où ils en avaient le plus besoin. Or c’est bien la Troïka qui a imposé cette saignée générale. Alors même que la santé est censée relever de la compétence des Etats, la Commission s’est royalement assise sur l’obligation légale qui lui est faite d’examiner les conséquences des politiques européennes sur la santé. Une saignée générale car imposée non seulement à la Grèce mais aussi au Portugal (baisse de 10% des dépenses de santé), à l’Irlande (7% de baisse) et aux autres pays dont elle est la créancière principale. C’est même toute l’Union Européenne, obnubilée par la sacro-sainte baisse des dépenses publiques, qui voit ses dépenses de santé baisser ou au mieux stagner. Le prix sanitaire de la crise est lourd : pour la première fois depuis des dizaines d’années, l’espérance de vie stagne au sein de l’UE (à 80,3 ans en moyenne) et baisse dans de nombreux pays : la Grèce, le Portugal, mais aussi … la France, avec 2 mois d’espérance de vie perdus entre 2011 et 2012 (de 82,3 à 82,1) et un taux de mortalité en augmentation (de 8.6‰ à 9‰ entre 2011 et 2012).

La santé des français sacrifiée

La disparition, puis la réapparition en catimini, du Ministère de la santé dans le gouvernement de Manuel Valls, est sur ce point hautement symbolique : elle traduit l’approche purement comptable de ce gouvernement, dont la seule obsession est de réduire le déficit. Ainsi se gargarise-t-il du fait que l’ONDAM (Objectif National des Dépenses d’Assurance-maladie, fixé chaque année par le parlement et dont l’objectif est de limiter la dépense publique de santé) ait été respecté depuis deux ans, que le déficit de l’assurance-maladie (évalué à 7.5 milliards d’euros) soit moindre qu’escompté (1 milliard de moins), alors même que cela se traduit par des indicateurs sanitaires en berne, et une dégradation de l’accès aux soins pour les français. Comme si cela ne suffisait pas, le gouvernement s’est fixé comme objectif de réduire les dépenses de l’assurance-maladie de 10 milliards d’euros supplémentaires, avec dans leur collimateur l’hôpital public. Or, celui-ci est déjà exsangue : la majorité des établissements publics hospitaliers sont en effet en sous-financement chronique et ont même dû s’endetter sur les marchés (en souscrivant notamment des crédits toxiques) pour simplement assurer leurs missions de service public, étant obligés par tous les plans d’économie qui leur sont infligés depuis des années de faire toujours mieux avec moins, avec à la clé une baisse de la qualité des soins et parfois des accidents dramatiques et des morts.
Les « solutions » pour réduire encore les dépenses sont donc évidentes : il s’agira de licencier du personnel, ou au moins de baisser leurs rémunérations, en revenant par exemple sur les 35H, de fermer des lits ou des services entiers, de fermer les hôpitaux de proximité qui ne réalisent pas assez d’actes, ce qui entrainera des difficultés d’accès aux soins et de plus en plus de renoncements purs et simples aux soins. In fine, c’est la situation sanitaire des français, déjà mise en péril par la crise, qui se dégradera chaque jour un peu plus. A la pauvreté et à la misère, en pleine croissance (14,3% de la population, soit presque 9 millions de français), s’ajoutera donc une dégradation du système de santé, que le gouvernement entend progressivement privatiser, pour le plus grand bonheur des grandes compagnies d’assurance privée. Sur ce point, le gouvernement Valls reproduit sciemment les erreurs qui ont été faites en Grèce, au Portugal et ailleurs, malgré leurs conséquences funestes et criminelles.

Mettre la santé au cœur de la politique

Il est donc urgent de rompre avec ces politiques austéritaires, qui anéantissent notre système de santé et rendent littéralement malades nos concitoyens. Les élections européennes constituent l’occasion de dire non à ces politiques et de porter les valeurs humanistes et solidaires sur lesquelles sont fondés notre système de sécurité sociale et notre pays. Le Parti de Gauche propose ainsi, en rupture avec les politiques actuelles, de partir des besoins sanitaires de la population afin d’adapter le financement de la santé en conséquence, d’augmenter progressivement le taux de remboursement jusqu’à 100%, et d’instaurer une véritable démocratie sanitaire qui permettre de rendre le système de santé plus efficace et surtout plus humain.

Nicolas Brault (Commission Santé du Parti de Gauche)